Voiture électrique : la France pourrait ouvrir une énorme mine de lithium
Le géant mondial minier Imerys annonce un projet d’extraction de lithium d’une mine dans l’Allier d’ici 2027. Il y aurait un million de tonnes de lithium dans le sol, soit plus que la quantité mondiale extraite en 2021.
Imerys, nous vous en parlions un peu plus tôt dans l’année. Ce géant français, leader mondial des « spécialités minérales pour l’industrie » avait racheté en 2005 une mine servant à la production de matières premières pour la céramique. Le groupe semblait rester alors assez prudent sur l’issue de ce projet qui aurait bien pu ne jamais avancer. Mais, coup de théâtre, Imerys annonce un énorme investissement sur place pour produire des milliers de tonnes d’hydroxyde de lithium d’ici la fin de la décennie. Un composé indispensable aux batteries des voitures électriques NMC (nickel-manganèse-cobalt) de nouvelle génération, soit celles utilisant moins de cobalt, environ 10% pour leur cathode contre 20% auparavant. En revanche, cet hydroxyde de lithium ne permettra pas de fabriquer de batterie LFP (lithium-phosphate de fer) puisque que ces dernières utilisent du carbonate de lithium utilisé auparavant dans les électrodes à fort taux de cobalt (environ 20%). Mais puisque les Français ont prévu de fabriquer des batteries lithium-ion tout est logique.
Du lithium français pour les voitures électriques
L’Europe serait-t-elle en train de rattraper un bout de son retard sur l’Asie en matière de métaux essentiels pour la mobilité électrique ? Nous n’y sommes pas encore. La Chine conserve l’avantage en matière de raffinage et sur certaines extractions. Il n’empêche, l’annonce d’Imerys a de quoi impressionner sur le papier. L’entreprise française a investi près de 30 millions d’euros pour des campagnes de recherche dans le sol de Beauvoir. Objectif : évaluer quelles quantités de lithium s’y trouvent. Le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) les estimaient à un peu plus de 300 000 tonnes, mais selon Imerys, il y aurait en fait près d’un million de tonnes d’oxyde de lithium dans le sol de l’Allier.
Evidemment, ce lithium n’est pas « pur ». Il doit être trié de la roche, dans des proportions de 100 pour 1 : autrement dit, il faudra extraire 100 tonnes de roche pour obtenir une tonne d’oxyde de lithium. Mais ce n’est que la première étape vers la production de dérivés destinés aux batteries : hydroxyde de lithium, carbonate de lithium… tous ces sous produits sont utilisés pour les électrodes (cathodes) et les électrolytes des batteries de voitures électriques. En clair, après l’extraction, il faut des raffineries pour traiter la matière première et en faire les composants essentiels aux véhicules rechargeables : c’est l’objectif de la seconde partie du projet d’Imerys, qui souhaite également installer une usine de traitement du lithium extrait, à proximité relative de la mine puisqu’on entend parler d’une centaine de kilomètres quand même. Au total, le projet s’élèverait à un milliard d’euros, mais avec un retour sur investissement « intéressant » selon Imerys qui vise une production située dans une fourchette entre 7 et 9 € par kilogramme de lithium produit.
Forcément, ce genre de projet soulève de nombreuses questions environnementales : même si ce lithium est souterrain et pas en saumures comme en Amérique du Sud, sa production reste une activité fortement impactante sur l’environnement. Et quid du transport des tonnes de métaux ? « Les initiatives de réduction des émissions de CO2 incluraient une flotte minière électrique, le transport par conduits souterrains, par train, ou l’utilisation du mix électrique français à faible émission de carbone« , explique le groupe français. D’ici 2027, nous aurons le temps d’en savoir plus sur les contours précis de ce projet.
700 000 voitures électriques par an ?
Ce site serait en mesure de produire quelque 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an, celui utilisé pour les batterie lithium-ion de nouvelle génération à faible taux de cobalt, et ce pour une durée de 25 ans minimum. « Il s’agirait de l’un des plus grands projets d’extraction de lithium de l’Union européenne qui pourrait, une fois pleinement opérationnel, équiper l’équivalent de 700 000 véhicules électriques par an en batteries lithium-ion« , dixit Imerys. Selon nos calculs de besoins nécessaires par batterie, ces chiffres avancés sont effectivement cohérents.
Si nous commençons enfin à avoir des usines d’assemblage de batteries en Europe, nous n’avons toujours pas les matières premières. Ceci réglerait une partie de la problématique, même si l’on dépendra toujours de l’étranger pour le cobalt et certains autres ingrédients ! En effet, une batterie, ce n’est pas que du lithium…
A la clé, une indépendance plus grande de l’Europe et 1000 emplois créés en Auvergne Rhône-Alpes. Imerys devrait par ailleurs avoir le soutien d’une partie de la classe politique qui y voit un moyen d’être moins à la merci de l’Asie dans le cadre de la transition énergétique. Mais comme toujours avec ce genre d’immense projet industriel, il y a un pas entre l’annonce, les chiffres d’études initiales, et la faisabilité réelle. « Imerys finalise l’étude de cadrage technique afin d’explorer les différentes options opérationnelles et affiner les aspects géologiques et industriels relatifs au processus d’extraction et de transformation du lithium qui devra répondre à des critères techniques, environnementaux et économiques exigeants. Imerys évalue également le potentiel de valorisation de coproduits (feldspath, tantale, étain)« . En clair, on ne pourra pas dire que la France deviendra un des principaux producteurs mondiaux de lithium tant que la première pierre de l’usine n’aura pas été posée.
source : www.automobile-magazine.fr
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